Initiative : Messaoud persiste et signe

Publié le par Abou Mélika

Le président de l’Alliance populaire progressiste (APP), Messaoud Ould Boulkheir, également président de l’Assemblée nationale, est décidé d’aller jusqu’au bout de son initiative pour trouver une issue négociée à la crise politique qui secoue la Mauritanie depuis bientôt trois ans. Dans la moughataa de Riyad, l’un des fiefs de l’APP où il était en meeting samedi dernier, le président de l’Assemblée nationale persiste et signe : son « initiative va dans l'intérêt des mauritaniens ».

Fort de cette conviction, Messaoud Ould Boulkheir ne semble pas décourager par le peu d’empressement que certains segments de la classe politique mettent à répondre favorablement à son initiative. Au niveau de la Coordination de l’opposition démocratique (COD), par exemple, chaque parti trouve une échappatoire dans cette réponse polie : « notre position sera celle de la COD ! Les formations de la Majorité, elles, attendent un signal fort du président Mohamed Ould Abdel Aziz pour dire « oui » ou « non », en fonction de la nécessité du moment.

Mais toujours est-il que Messaoud Ould Boulkheir peut compter sur trois éléments, non négligeable, allant dans le sens de l’acceptation, à court ou moyen termes, de son initiative.

Il y a d’abord que les mauritaniens, majorité et opposition confondues, n’ont aucune volonté de suivre la voie du « printemps arabe » que suggère une partie de la COD. Les désagréments que les « révolutions » ont causé en Egypte, Libye, Syrie et Yémen font que les citoyens lambdas ne veulent pas servir de « munitions » à une guerre pour le pouvoir entre hommes politiques rompus aux manœuvres de toutes sortes.

Il y a aussi que l’Association des Maires de Mauritanie (AMM) à laquelle le président de l’Assemblée nationale a exposé récemment son initiative, a approuvé sans réserve une telle démarche, ce qui est une attitude de bonne politique s’inscrivant dans le sens de l’intérêt général des populations très peu enclines à régler leurs différends dans la rue.

Il y a enfin, qu’au sein même de la Majorité présidentielle, trois partis (Adil, MPR, RD), qui avaient lancé une initiative similaire, semblent se ranger sous la bannière du président de l’Assemblée nationale pour éviter à la Mauritanie les soubresauts d’une crise politique qui n’a que trop durer.


La COD fait de la « résistance »


Cependant, au niveau de la COD, les vieilles rivalités politiques entre le leader haratine et d’anciens compagnons de lutte au sein de l’opposition resurgissent pour empêcher l’initiative de Messaoud Ould Boulkheir d’être adoptée – et même adaptée, s’il le faut – pour permettre à la Mauritanie d’éviter le pire. Même quand ces leaders politiques sont d’accord avec lui sur l’essentiel, à savoir que « le pays traverse depuis plusieurs mois une crise multidimensionnelle » et que le meilleur moyen d’en sortir n’est pas assurément le recours à la confrontation.

Au meeting de Riad, Messaoud Ould Boulkheir est revenu sur les grands axes du dialogue de septembre dernier entre le pouvoir et quatre partis d’opposition, insistant sur le caractère « réformiste » des résultats de celui-ci. La mise en application des points de convergence ne sont d’ailleurs pas incompatibles avec l’initiative qui, dans son essence, essaie de servir de négociation de « rattrapage » pour ne pas laisser une partie de l’opposition en dehors du processus de sortie de crise.

La proposition d’un gouvernement d’union nationale est à inscrire, dans ce cadre, au registre des mesures à prendre pour relancer la machine et visant à rapprocher les positions, actuellement aux extrêmes, du pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz et de la Coordination de l’opposition démocratique (COD).

S’il ne s’agit pas d’amener les deux à s’asseoir autour d’une même table pour discuter des questions qui fâchent- ce qui serait assimilable par certains à ce dialogue que la COD a déjà refusé – certains évoquent la recherche d’une sorte de compromis qui passeraient, nécessairement, par la démission de l’équipe du Premier ministre Moulay Ould Mohamed Laghdaf et la mise en place d’un  gouvernement d’union nationale. Une idée à laquelle tient le président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir mais qui n’enchante pas vraiment la COD déjà très engagée dans une sorte de lutte à mort avec le pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz.

A dire vrai, la Coordination de l’opposition démocratique a de fortes craintes qu’il ne s’agisse, tout bonnement, d’un remake du dénouement choisi pour la crise de 2008. Pour ceux qui voient les choses ainsi, seule aura changé la qualité du facilitateur : La communauté internationale en 2008 (UA, UE, Onu, à travers le défunt Guide libyen Kadhafi, le président Wade) et, si les choses se présentent bien, Messaoud Ould Boulkheir qui a la singularité d’être à la fois impliqué dans cette crise, étant l’une des personnalités politiques les plus en vue actuellement en Mauritanie mais aussi celui qui anime l’un des pôles de l’opposition : La Convention pour une Alternance Pacifique (CAP).

Cette situation assimilable à celle de « juge et partie » ne rend pas facile la mission du président de l’Assemblée nationale. Le dialogue qu’il a choisi de mener, au nom de son parti, l’Alliance populaire progressiste (APP) et de trois autres formations alliées (Al Wiam, Sawab et Hamam, ce dernier ayant choisi de se retirer), est le principal point de discorde aujourd’hui entre lui et les leaders de la COD. D’ailleurs, jusqu’aux dernières rencontres avec certains responsables de celle-ci, Messaoud Ould Boulkheir était accusé par la COD d’avoir choisi son camp ! Pourtant, pour qui connait l’homme – et a entendu sa dernière sortie à la télévision nationale – l’homme est resté lui-même : Un parler franc et une volonté d’œuvrer inlassablement pour éviter à la Mauritanie de suivre le même cheminement qu’ont pris certains pays arabes, entraîné par le vent du « printemps arabe » et qui n’arrivent pas encore à toucher la rive salutaire de la démocratie. Une position du juste milieu qui correspond parfaitement à l’image d’un Messaoud qui, malgré la dureté des propos, vue par certains comme un défaut mignon, est présentement le Sage de tous ceux qui, depuis le coup d’Etat contre le président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, animent la scène politique nationale et tentent de tirer profit d’une situation de crise qui change à tout instant.

 

Sneiba Mohamed

 

 

Publié dans Politique

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